L’une des plus graves crises du monde

Le 26 mars 2015, la coalition menée par l’Arabie saoudite lançait des frappes aériennes contre les Houthis – groupe armé au Yémen – déclenchant un conflit armé de grande ampleur. Un an plus tard, la population yéménite est toujours otage des combats. Le Yémen compte 26 millions d’habitants, parmi lesquels 80% ont besoin d’une aide humanitaire d’urgence, selon les Nations Unies. La guerre a fait de nombreuses victimes et a entrainé le déplacement massif de plus de 2,5 millions de personnes, majoritairement des femmes et des enfants. Alors que le conflit a fait officiellement 30 000 blessés et 6 000 morts, les possibilités de mener des programmes d’aide restent limitées tant par le manque de moyens que par les problèmes d’accès et d’insécurité.

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Il y a déjà plusieurs mois, l’envoyé spécial de l’ONU pour le Yémen signalait que le pays se trouvait « au bord de la famine ». La moitié de la population est en situation d’insécurité alimentaire, et 2 millions de personnes parmi les plus vulnérables sont touchées par la sous-nutrition aiguë. L’urgence est critique pour près de 320 000 enfants touchés par la malnutrition aiguë sévère. Nos équipes observent des signes d’aggravation de la situation.

Le Yémen, dépendant majoritairement des importations, notamment alimentaires, est aujourd’hui coupé du monde et les moyens d’existence de la population se sont effondrés. Le pays s’est retrouvé rapidement plongé dans une situation d’insécurité alimentaire généralisée. Les difficultés d’accès, de transport et la pénurie de carburant entretiennent une très forte hausse des prix des produits de base. Une grande partie de la population a vu ses sources de revenus chuter dramatiquement. Si la nourriture et l’aide humanitaire parviennent peu à peu à entrer dans le pays depuis quelques semaines, l’insécurité alimentaire est encore très élevée et les prix des aliments restent inaccessibles pour les personnes vulnérables. Les activités agricoles et la pêche qui constituaient la principale source de revenu de plus de la moitié de la population yéménite, sont désormais limitées.

UNE GUERRE SANS DROIT

Le mépris flagrant de toutes les parties au conflit pour le Droit International Humanitaire et les droits humains a des conséquences extrêmement lourdes pour les populations civiles en termes de pertes humaines, d’accès aux services de base, de dégradation des conditions de vie, etc.

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De même, loin de faciliter le libre passage de l’aide, le travail des organisations humanitaires pour venir en aide aux victimes est freiné au quotidien.  La liste des violations contre les travailleurs humanitaires  ne cesse de s’allonger : pillage des bureaux d’ONG1, intrusion d’hommes armés dans des centres de soins2, confiscation des papiers d’identité des équipes, détentions et arrestations arbitraires, vols de matérie. Près d’une dizaine de travailleurs humanitaires ont été tués depuis un an.

1 Bureau d’Action contre la Faim à Aden pillé, comme ceux d’à peu près toute la communauté humanitaire au moment des combats dans Aden.

2 Le 13 juillet 2015, des combattants armés ont fait intrusion dans l’un des centres d’Action contre la Faim, situé dans le sud du gouvernorat d’Hodeida. Les hommes armés ont vérifié la nourriture, les médicaments et le matériel humanitaire distribués par les équipes, ainsi que l’identité de chacun. Cela constitue une menace réelle et directe pour la sécurité des travailleurs humanitaires et des bénéficiaires présents à ce moment-là.

QU’EST-CE QUE LE DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE ?

Le droit international humanitaire – DIH – est un ensemble de règles s’appliquant en temps de conflit armé qui, pour des raisons humanitaires, cherchent à limiter en les effets sur les populations. Le DIH est également appelé « droit de la guerre » ou « droit des conflits armés ». Le DIH couvre notamment deux domaines : la protection des civils, personnes qui ne participent pas, ou plus, aux combats ; et les restrictions aux moyens de guerre (principalement les armes) et aux méthodes de guerre, comme certaines tactiques militaires.

LA POSITION FRANÇAISE AMBIGUË


De nombreuses condamnations internationales se sont élevées face aux violations commises par les parties au conflit au Yémen1. Malgré cela, la France poursuit son soutien à la coalition armée menée par l’Arabie Saoudite et n’a pas condamné publiquement les agissements de la coalition.

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Alors que selon le Traité international sur le Commerce des Armes, la France devrait suspendre ces ventes et transferts d’équipements militaires vers toutes les parties au conflit, il semble qu’elle privilégie les aspects commerciaux et économiques dans sa relation avec l’Arabie Saoudite plutôt que la recherche d’une solution diplomatique au conflit qui fait rage au Yémen voisin. Action contre la Faim réitère son appel aux autorités françaises à s’impliquer davantage sur les fronts diplomatique et humanitaire en obtenant de la coalition menée par l’Arabie Saoudite un cessez-le-feu pour protéger la vie de millions de civils yéménites et permettre un accès sans entrave à l’aide humanitaire et aux biens de première nécessité dans le pays.

1 Dont l’adoption par le Parlement Européen de la résolution 2016/2515 condamnant les violences, les bombardements ainsi que le blocus ; appelant toutes les parties à assurer la protection des civils et éviter de cibler les infrastructures civiles, en particulier les structures médicales ; et invitant à la mise ne place d’un embargo européen sur les armes à l’Arabie Saoudite .

L’ACTION HUMANITAIRE ENTRAVÉE DANS SON ENSEMBLE

Aujourd’hui, l’insécurité et les combats limitent drastiquement les mouvements des biens et des personnes dans le pays.

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Les populations peinent à accéder à l’aide et l’intervention des humanitaires est limitée par de nombreux obstacles posés par les parties au conflit. Intervenir au Yémen aujourd’hui est particulièrement éprouvant et complexe pour les équipes : irruption d’hommes armés sur les lieux des programmes et dans des centres nutritionnels, menaces envers les équipes, violences physiques, intimidations, mises en joue, vol de matériel, pressions croissantes des autorités locales, tentatives de contrôle de l’aide ou de sélection des bénéficiaires…
Cette situation extrêmement complexe au quotidien a de fortes conséquences sur les programmes développés par nos équipes et l’aide ainsi apportée aux populations. Chaque jour, les 170 membres de l’équipe ACF au Yémen tentent de contourner au maximum ces obstacles.

NOTRE INTERVENTION AU YÉMEN

Action contre la Faim est l’une des rares ONG encore présente dans le pays. Nos équipes intervenait déjà dans le pays avant le début de la guerre.

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Depuis 2012, des programmes dans ses différents domaines d’expertise sont mis en place pour soutenir les populations. Entre pauvreté, problèmes environnementaux, insécurité et faiblesse de l’Etat, le pays fait face depuis des années à d’énormes besoins humanitaires. En 2014 déjà, près de 15,9 millions de personnes nécessitaient une aide humanitaire, soit 61% de la population. Le constat est frappant : le conflit a exacerbé les vulnérabilités déjà existantes.

Aujourd’hui, plus de 170 professionnels mènent des activités humanitaires regroupées autour des villes de Sanaa, où se trouve l’équipe de coordination d’Action contre la Faim, ainsi que dans les provinces d’Hodeidah, Hajjah, Aden, Abyan et Lahj. Depuis le début de la crise de 2015, nos équipes ont axé leurs activités sur l’urgence et attachent un soin particulier à venir en aide aux populations déplacées. Ces derniers mois, nos équipes ont dû annuler, reporter ou adapter leurs activités à de très nombreuses reprises. Les pénuries de médicaments et le processus extrêmement complexe et coûteux pour importer des médicaments limitent quant à eux la mise en place des programmes de santé.

Dans les domaines de la nutrition et de la santé, Action contre la Faim a mis en place des consultations médicales, des traitements thérapeutiques et des séances de prévention. Une attention particulière est portée aux enfants de moins de 5 ans. Les femmes enceintes et allaitantes bénéficient d’un suivi pré et post-natal, incluant un apport en micronutriments.
Dans le domaine de la sécurité alimentaire Action contre la Faim met en place des programmes de soutien financier et de distributions de coupons alimentaires. Des produits de première nécessité sont également distribués lorsque les marchés locaux ne sont pas fonctionnels.
En eau, assainissement et hygiène, nos équipes multiplient les réhabilitations et les constructions de points d’eau et de latrines au niveau communautaire ainsi que dans les écoles et centres de santé. Des sessions de promotion à l’hygiène y sont organisées. Les familles les plus vulnérables bénéficient des distributions de kits d’hygiène et de filtres à eau en céramique.

 

 


Refusons que les civils passent #1anDePlus sous les bombes

Les ONG appellent à un cessez-le-feu immédiat et une résolution politique durable du conflit. Elles demandent la mise en place d’une commission d’enquête internationale indépendante sur le nombre croissant d’allégations de crimes de guerre, et demandent l’extension de l’embargo sur les armes à toutes les parties violant les lois de la guerre au Yémen.

Nous demandons :
  • L’amélioration immédiate et la facilitation par tous de l’accès humanitaire
  • Des condamnations fortes des violations du droit international humanitaire et des droits humains, y compris les violations à l’encontre des enfants par toutes les parties du conflit
  • Un réel respect du Droit International Humanitaire pour que l’impact du conflit sur les civils et les services aux civils soit minimum